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Colomba « hors la loi », autour du film d’Ange Casta (2)



En 1967, Ange Casta tourne Colomba pour l'ORTF. Loin de s'en tenir à une simple adaptation du roman de Prosper Mérimée, le réalisateur oriente de nouvelles interprétations et interroge tout particulièrement le rapport entre coutume et loi. Tonì Casalonga et Nathalie Goedert poursuivent leur conversation artistico-juridique et abordent dans ce second chjam'è rispondi les questions de nécessité, de dérogation à la coutume et de vengeance.



photogramme du film, 1967
photogramme du film, 1967
Orales, répétées, immémoriales et territoriales, revêtues de l’opinio necessitatis, les règles relatives à la vengeance participent sans aucun doute du droit coutumier. Contrairement à Mérimée qui sous couvert de romanesque accuse et méprise des usages surannés, c’est en la replaçant dans le cadre du droit coutumier qu’Ange Casta interroge la légitimité de la vengeance, rappelant qu’elle fut, en son temps, un mode légitime de règlement des conflits.

La vengeance, mode légitime de règlement des conflits

Historiquement, le système vindicatoire cède à mesure que se met progressivement en place une justice publique. Dans le prolongement d’un discours légaliste savamment martelé, visant à justifier le passage de la vengeance privée à une justice d’Etat par un processus de rationalisation du droit, on a un peu facilement considéré la violence de la vendetta comme un facteur de troubles. Au désordre de la vengeance privée succédait l’ordre judiciaire ; à l’irrationnel d’une organisation politique et sociale fondée sur la croyance, on substituait la raison d’une justice d’Etat. La coutume insaisissable et peu fiable n’aurait su résister à la vague de progrès commandée par le triomphe de la légalité. Pourtant, la violence n’est pas nécessairement anarchique ; et longtemps, en l’absence d’institutions étatiques, elle a régulé le jeu social par un système rigoureusement organisé et codifié qui s’inscrivait dans un cadre normatif et explicitement juridique : celui de la coutume.
Pour l’expliquer, Ange Casta place dans la bouche des anciens réunis à la veillée, un discours qu’on ne trouve pas chez Mérimée, celui de la tradition : « Chez nous, la vengeance ne perd jamais son droit » rappelle l’un des hommes assis autour du feu. Les récits de vengeance appartiennent au patrimoine culturel communautaire. Le retour d’Ors’Anton rend imminent le réveil de la violence. Et tandis que dans l’intimité de son foyer, malgré les réticences manifestées par son frère, Colomba met tout en place pour que son père soit vengé le moment venu, c’est dans le sanctuaire de la mémoire que la communauté s’y prépare. Le récit qui commence en voix off, décliné comme un conte, vise d’abord à inscrire une affaire apparemment privée -la guerre de deux familles- dans une histoire collective. Toute la communauté en effet est concernée par la vengeance ; elle en subira les effets, elle doit en connaître les causes et les règles. Les visages et les gestes, jusqu’aux intonations du chant disent la solennité et la gravité du moment. La veillée est tout à la fois acte de remémoration et d’appropriation collective. Elle vaut rite d’adhésion à la coutume, reconnaissance de sa nécessité et de sa légitimité. Le récit procède ainsi comme une cosmogonie qui rappelle les fondements de l’ordre social, de ce qui le fait tenir, de ce qui le menace. Dans une conception cyclique du temps, la vengeance est équilibre, équilibre en perpétuel mouvement pendulaire. Elle va et vient sans qu’on en discerne l’issue, sans que l’on voit « où elle pourra s’arrêter ».
« La vie tantôt monte, tantôt descend, les choses vont mieux pour une famille, puis pour l’autre. Les Barraccini dominaient la situation, il croyaient l’avoir imposée aux della Rebbia, on pensait que tout était terminé, mais aujourd’hui Ors’Anton, le fils, est de retour… »
Comme pour associer le geste à la parole, pour illustrer le retournement de la situation qui s’annonce, l’image s’attarde sur la cuisson des migliacci et le mouvement de la femme qui, en un tournemain, place dessous, pour la faire cuire, la face qui était dessus.
Dans cette société traditionnelle qui sait que « les vies sont courtes, les misères sont longues », c’est l’honneur, qui constitue la véritable armature sociale. Le vrai facteur de désordre, ce n’est pas l’inimitié – « Il vaut mieux un bon ennemi qu’un mauvais ami ! » dit Colomba-, c’est l’offense[1] . « L’honneur demande réparation », fut-ce au prix d’une vie. Là est la véritable injonction coutumière qui légitime la vengeance et que le chant construit comme un appel d’un mort lâchement assassiné qui ne trouve pas le repos, rappelle. L’obligation de la vengeance – ici figurée par la chemise ensanglantée et la croix d’honneur, celle de l’honneur bafoué- est le seul héritage de celui dont le père est mortu di malamorte [2]. Nul ne pourrait comprendre qu’il s’y dérobe, fut-ce au nom du respect de la loi[3]. Le silence qui suit le chant dit la cohésion de la communauté réunie. La vengeance n’est pas division quand l’honneur est en cause. Porter atteinte à l’honneur d’un de ses membres, c’est menacer la communauté tout entière. Au point que, dans le système vindicatoire, celui qui se venge, pour sauver son honneur, n’est pas considéré comme un criminel. C’est le sens de la réponse de Colomba à son frère qui lui demande ce qu’a fait le bandit à qui elle envoie du pain ; formule que la vision légaliste transforme en oxymore : « Il n’a pas commis de crime, il a tué Giovan Opizzo qui avait assassiné son père ». Dans le système vindicatoire, celui qui tue n’est pas nécessairement un criminel. Ce qui constitue un crime aux yeux de la loi, ne l’est pas pour la coutume. C’est la loi qui fait du vengeur un bandit, c’est elle qui le pousse au maquis. Mais nul au sein de la communauté ne désapprouve son acte. Car malgré le sang versé, la vengeance ne brise pas l’équilibre social, elle n’est pas désordre ; dans une société qui accorde plus de prix à l’honneur qu’à la vie, bien au contraire elle est justice.
Or précisément le système légaliste, qui a institué le monopole de la justice d’Etat, nie toute dimension judiciaire à la vendetta et refuse d’y voir, ne serait-ce que les rémanences d’un mode de règlement des conflits. Il est très significatif à ce propos que le préfet, tout nouvellement institué en l’an VIII, se coule dans le rôle de pacificateur, cherchant à mettre un terme au cycle vindicatoire en réconciliant les familles. Le préfet est, en ce début du XIXe siècle, un administrateur omnipotent. Un domaine pourtant lui échappe : celui de la justice. S’il s’occupe des vendettas comme nous le montre cette intrigue très conforme ici à la réalité historique, c’est que précisément, pour un état qui prend bien soin de séparer, pour mieux en minimiser l’importance, la cause de ses effets, les hostilités villageoises relèvent du maintien de l’ordre [4]; seul le crime, privé alors de son fondement, relève de la justice. Au XIXe siècle, l’institution judiciaire ignore la vengeance, refuse de l’intégrer dans ses critères d’appréciation, et ne connaît que du crime, au point de s’égarer parfois [5]. Ce qui révèle encore le fossé d’incompréhensions qui sépare deux systèmes de justice parallèles dont les fondements conceptuels sont radialement différents.
La légitimité de la violence n’est pas pour autant la marque d’une société violente. C’est là aussi un discours réducteur qu’Ange Casta conteste. Il montre une communauté villageoise qui n’est pas indifférente à la mort loin de là. Comme en attestent les rites et usages mortuaires, la mort déchire les cœurs et on pleure longtemps ses défunts. Aucun des acteurs du jeu social ne souhaite voir le sang couler ; mais tous s’y résignent par fatalité. Unie face à l’épreuve que constitue la vengeance, la communauté reste neutre dans un conflit qui n’oppose que deux clans. Elle veille mais ne prend pas parti[6]. Car la vendetta ne doit pas entraîner tout le village à sa perte.
En 1818, date où se déroule l’intrigue, l’usage de la violence privée dans la résolution d’un conflit n’est plus ni légal ni légitime. La justice publique a depuis longtemps imposé ses règles, recensées dans des codes, symboles du triomphe du droit écrit sur le droit oral [7]. Mais Ange Casta se contente de rappeler que la vengeance fut, en son temps, légitime et nécessaire. Qu’elle était facteur d’équilibre et s’insérait à ce titre dans un système normatif, ni moins juste, ni moins rationnel que le système mis en place par la loi. Tout comme il a cherché à disqualifier la coutume pour mieux défendre la loi, le discours légaliste a sans doute également exagéré les désordres de la vendetta pour mieux justifier l’action publique. Le film d’Ange Casta est une invitation à appréhender le règlement du conflit non pas « du dehors », mais « du dedans », à l’observer au prisme des mentalités de l’époque et de la communauté qui y a recours. Pour comprendre la société judiciaire au temps de Colomba, il faut en pénétrer les rituels. Celui de la vengeance en est un. Bien que violent, il permet le rétablissement de la paix sociale. Mais la vengeance de Colomba était-elle nécessaire ?
 

[1] Le même code de l’honneur semble conduire les relations d’Ors’Anton et du colonel Nevil, devenus amis après avoir « échangé quelques balles à Waterloo ».
[2] « De le regarder en face, ils n’ont pas eu le courage, ils l’ont pris par trahison, ainsi l’a voulu son destin, mais si le feu s’échappe, prenez garde où il ira. Placez à mon chevet ma croix d’honneur, rouge en est le ruban, rouge aussi est la chemise, je les laisse à mon fils, il n’aura pas d’autre trésor. De venger son père, il sera sûrement digne ».
[3] Colomba répond à la même nécessité quand elle implore Ors’Anton : « Il est temps que cela finisse ! Venge le mon frère, venge le ! »
[4] Le préfet chez Colomba : « Je veillerai à ce que l’ordre ne soit pas troublé et que justice soit faite ; je parle pour vous tous. »
[5] Ce que le préfet qualifie de suppositions stupides est la vérité et ce qu’il considère comme une preuve est la lettre mensongère d’un  témoin acheté. Ce qui est pour l’Etat « une affaire classée », est injustice pour Colomba : « Agostini n’a pas tué notre père. On a attendu que les voltigeurs l’aient tué pour l’accuser. C’était plus facile ; les véritables assassins sont vivants eux. »
[6] Une très courte séquence rend compte de cette neutralité. Ors’Anton, seul sur le chemin, croise un homme qui le salue et le prévient : « Vos ennemis se promènent dans le coin ». Mais quand Ors’Anton, dont on sent monter l’inquiétude le questionne : « où ? », ce dernier se contente de répondre « Je les ai vus ». Prévenir n’est pas trahir.
[7]Dès le Ve siècle on trouve dans le prologue de la loi salique ce désir de « mettre un terme à l’enchaînement des violences » qui résultent de la vengeance, en proposant un système de composition pécuniaire. Mais la féodalité et le déclin de la puissance publique qui l’accompagne voient le retour des guerres privées que les coutumes médiévales consacrent comme mode de règlement des conflits.

Necessità

C’est une autre nécessité qu’Ange Casta convoque à la fin de son film ; une nécessité qui lui permet de conserver sa fidélité au récit de Mérimée tout en restant juridiquement cohérent. Dans la version romanesque comme dans le film, Colomba tue les deux frères Barraccini. Bien que ce soit Ors’Anton qui a tiré, tous savent en effet que Colomba est l’instigatrice de la vengeance, qu’elle l’a non seulement nourrie mais provoquée, allant jusqu’à mutiler l’un de ses propres chevaux en signe de début des hostilités, et ils lui attribuent les meurtres. Mérimée brosse ainsi le portrait d’une héroïne cruelle, incapable de compatir à la douleur d’un père qu’elle a privé de ses deux fils. Dans le roman en effet, quand Colomba rencontre par hasard, en Italie, longtemps après les faits, le vieux Barriccini et qu’il lui demande, brisé par la tristesse : « Pourquoi tous les deux ?», celle-ci répond encore animée de haine : « Il me les fallait tous les deux (…) Les rameaux sont coupés ; et si la souche n’était pas pourrie, je l’eusse arrachée. Va, ne te plains pas ; tu n’as pas longtemps à souffrir. Moi j’ai souffert deux ans ». Dans le film en revanche, la même question est posée à Colomba [1], mais cette fois par une vieille femme, assise au coin d’une ruelle, qui observe le vieux Barriccini, au moment où il quitte le village tel un vaincu. Placée dans ce contexte, la réplique n’a plus rien de l’imploration d’un père accablé ; elle prend des accents réprobateurs. Car Colomba a enfreint la règle et c’est précisément ce que la communauté, incarnée par cette vieille femme, lui reproche. La règle de la vengeance coutumière qui veut qu’on prenne une vie pour une vie… et non pas deux. Règle que le chanteur avait pris soin de rappeler à la veillée : « Je veux la main qui a tiré, l’œil qui a visé, je veux le cœur qui a pensé, va mon fils, va et fais. » Dans le cas contraire, la vengeance devient pure cruauté et source de déséquilibre. Ce que la communauté ne saurait tolérer. En prenant deux vies, Colomba a rompu l’ordre coutumier. Ce n’est donc pas une Colomba vengeresse et triomphante qui répond à la gardienne des coutumes. Necessità ! Pour être brève, quasi elliptique, la dernière réplique n’en est pas moins importante. En un seul mot, précédé d’un long silence qui en exprime toute la gravité, Colomba reconnaît qu’elle s’est écartée de la loi coutumière, et invoque en même temps l’excuse de nécessité qui justifie cet écart, démontrant sa parfaite maîtrise du droit coutumier jusque dans ses subtilités les plus complexes. L’excuse de nécessité, théorisée par les canonistes dès le XIIe siècle, mais en usage dans bon nombre de sociétés coutumières et traduite par l’adage « Nécessité n’a point de loi », permet de s’exonérer de la loi, et donc de commettre un délit quand il permet d’éviter un péril imminent et plus grave. Choix cornélien entre deux maux réels mais d’inégale valeur l’état de nécessité n’est pas conçu ici comme une fatalité, mais conserve au contraire entier le libre arbitre de celui à qui il appartient d’opter pour le mal le moins grave. La doctrine canoniste s’élabore avant tout sur une hiérarchie des valeurs, qui place la vie humaine au-dessus des biens matériels. L’atteinte au bien d’autrui, bien que délictueuse, est ainsi excusée si elle a permis de sauver sa vie ou celle d’un autre menacé. Mais on admet aussi que l’état de nécessité justifie une atteinte à la vie humaine, pour sauver sa propre vie ou son intégrité physique, pour préserver son honneur, pour protéger sa pudeur. La doctrine canoniste se rattache aussi à l’idée de solidarité en laissant entendre que le mal le moins grave est celui qui préserve le mieux la société[2] . C’est dans ce cadre que se place Colomba. Dans une société où l’honneur compte plus que la vie, il a fallu affronter les deux frères et les tuer tous les deux. Colomba aurait pu se dédouaner en évoquant la légitime défense, disposition légale qui excuse l’homicide quand il répond à une agression injuste[3]. Concept qui s’applique très exactement aux circonstances. C’est d’ailleurs à ce titre, au terme d’une enquête qui conclue qu’Ors’Anton a tiré après avoir été lui-même agressé, que le non-lieu est prononcé[4] . Mais cette solution légale qui exonère Ors’Anton a également pour effet de gommer l’existence de la vengeance donc d’effacer les fondements mêmes du double assassinat. La légitime défense ne venge pas l’offense ! La vengeance nous dit Ange Casta par la voix de Colomba n’est pas la légitime défense. Voilà pourquoi Colomba ne s’inscrit pas dans le cadre légal, dont telle Antigone, elle ne se réclame pas. Elle ne cherche pas à excuser le crime ; au contraire, l’honneur exige qu’elle le revendique. Elle aurait dans le cas contraire manqué à son devoir de vengeance. Elle doit en revanche, dans le cadre coutumier qui est le sien, justifier le double crime. La nuance est d’importance. Par ce seul mot, necessità ! elle ne rappelle pas la nécessité de la vengeance pour justifier son acte, elle s’excuse au contraire en évoquant « l’état de nécessité » – et c’est précisément ce que l’on attend d’elle - d’avoir violé la coutume en prenant deux vies au lieu d’une.
Dans la mesure où la nécessité permet de « défaire la loi », en invoquant l’excuse de nécessité Colomba confirme a contrario le caractère pleinement juridique des règles du système vindicatoire. La vengeance n’est pas pulsion, elle repose sur un système de règles parfaitement codifié. Aux yeux de sa communauté, si Colomba est hors la loi, ce n’est pas parce qu’elle a tué par le bras de son frère, mais parce qu’elle a outrepassé le droit que la coutume lui accordait. Dans une métaphore toute cinématographique, en sortant du cadre de la coutume, elle éclaire mieux encore la règle coutumière. Car reconnaître qu’on s’est affranchi de la règle, c’est attester de son existence. Ainsi la réplique précise et renforce le discours d’Ange Casta, montrant que la coutume « fait loi », puisqu’on ne s’en exonère que par « nécessité ».
Certes le système vindicatoire est illégal au XIXe s et les coutumes sont abolies. Mais là n’est pas l’essentiel de la démonstration que nous livre le réalisateur. Par ses apports de mise en scène, il met face à face des systèmes juridiques équivalents, celui de la loi et celui de la coutume, et réinterroge le passage de l’un à l’autre. La question que, dans le film,  Natale pose à Marie-Augustine à propos de la guerre qui oppose les clans Bariccini  et della Rebbia semble alors pouvoir s’appliquer à cet autre combat, celui qui a opposé la loi et la coutume : « Qui avait raison ? »
 
 
[1] « O Colomba, pourquoi les as-tu pris tous les deux ? »
[2]L’infraction « doit être commise pour le plus grand intérêt de la société »,  Chevalier (J. Y.), « L’état de nécessité ». Mélanges en l’honneur du doyen Pierre Bouzat, Paris, 1980, p. 117-134.
[3] Article 328 du code pénal de 1810 : « Il n’y a ni crime, ni délit, lorsque l’homicide, les blessures et les coups étaient commandés par la nécessité actuelle de la légitime défense de soi-même ou d’autrui ».
[4] Le préfet à Ors’Anton : « Il faut admettre que vos agresseurs ont tiré les premiers. Dans ces conditions j’adresse au Procureur du Roi une requête de non-lieu en votre faveur. »

Conclusion

Articulée autour du double sens que le droit donne à la nécessité, qui fonde la règle et qui permet d’y déroger, Ange Casta propose une définition intuitive mais redoutablement réaliste de la coutume. Ce faisant, il revisite une page de l’histoire du droit, proposant sa vision de la lente et difficile substitution de la loi nationale aux coutumes locales. La présence au cœur du film d’une abstraction juridique aussi insaisissable que la nécessité, illustre les rapports étroits qui lient l’art et le droit et démontre que l’appréhension sensible du juridique peut être aussi juste que sa connaissance savante et technique. En la matière, le film livre des clés de compréhension sur les rapports entre le centre et les territoires, clés que le juriste ne saurait négliger.
Aujourd’hui en effet, sur les relations entre l’Etat et la Corse, ne pèse-t-il pas comme un parfum de vengeance qui vient s’ajouter à deux siècles pendant lequel, faute de savoir partager l’implicite d’une communauté, le pouvoir a voulu imposer aveuglément sa loi ? Cela ne conduit-il pas à une situation proprement inversée, ou le retournement qui fait peser sur toute une population l’acte d’un individu met l’Etat dans l’impossibilité de justifier explicitement pourquoi il enfreint ses propres règles ? C’est la question que nous pose désormais ce film.

Pour aller plus loin

Sur les rapports entre la justice et la violence voir René Girard, La violence et le sacré, Grasset, 1972.
 
Jeudi 24 Février 2022
Tonì Casalonga et Nathalie Goedert


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