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A ghjuventù corsa, vista da Lola Reboud



Lola Reboud fait des images pour révéler la puissance des milieux. Elle saisit l’humain qui se grave (graphein) dans sa terre (gê) et rappelle que notre existence est géographique. En Corse, elle donne à voir la vivacité de cette ontologie, où l’adolescence rime avec concrescence : « Concretus, en latin, c’était le participe passé de concrescere : grandir ensemble. Dans les îles comme dans la réalité du monde, les gens, les mots et les choses ont grandi ensemble ; ils ont une histoire commune. » comme nous le rappelle Augustin Berque.



La cigarette, Lola Reboud, Luri, janvier 2017
La cigarette, Lola Reboud, Luri, janvier 2017
Lola Reboud est née en 1982. Sa formation universitaire et artistique aux Beaux-Arts de Cergy et aux Arts décoratifs de Paris l’a conduite à la photo. Son fil conducteur, c’est la mise en lumière de la relation que nous entretenons aux « Climats », c’est-à-dire aux lieux de vie appréhendés à la fois en tant que milieu géographique et milieu humain.
Lorsqu’elle a été lauréate de la commande photographique du CNAP  sur « La jeunesse en France », elle a choisi de travailler sur la Corse. Elle connaît bien le Cap et la Castagniccia en particulier, car plusieurs de ses grands-parents en sont originaires et elle y déjà souvent exercé son regard et sa sensibilité.

Stoppia Nova, Lola Reboud, janvier 2017
Stoppia Nova, Lola Reboud, janvier 2017
Mais travailler sur la jeunesse corse pour elle, c’est aussi travailler sur une jeunesse encore très présente dans le rural. C’est aussi comme ça que peut se lire le titre de cette série 180 km après la mer.
Lola regarde doucement ces jeunes gens dans leur âge en suspens : « J’ai photographié Antonia une première fois en Corse lorsqu’elle avait 7 ans. Je la retrouve 10 ans plus tard chez ses parents, dans son village isolé de montagne. C’est l’hiver et c’est avec son cheval qu’elle veut que je la photographie. Ceccè sillonne le cap à vélo quand il ne part pas à la chasse, Lucie attend son amoureux qui étudie sur le continent… »
 
 

La chasse, Lola Reboud, décembre 2016
La chasse, Lola Reboud, décembre 2016
Jeunes dryades et héros en attente de métamorphose, ils ont poussé là et sont à l’image des lieux.
Dans ces paysages à la fois empreinte et matrice, ils se dressent, s’interrogent, s’étreignent.
Se distinguent ou se dissimulent.
Comme des demi-dieux, ils sont fils des lieux et de leurs aïeux.
 
Cresciuti à mez’a machja, cresciuti cumè a machja.
Petites divinités liées aux lieux. Pieds, poings et yeux.
Ghjuventù machjaghjola, folta più chè a fola.
 
 

Sans titre, Lola Reboud, Saint Florent, janvier 2017
Sans titre, Lola Reboud, Saint Florent, janvier 2017
La jeunesse qu’elle photographie ici oscille entre mésologie [du grec mesos (milieu)] et mythologie [de mûthos (parole)] pour mieux faire vivre sa cosmogonie insulaire.

Mi mettu à sunnià
è mi cunfondu incù le stelle
Ramentendu e stonde belle
è lu piacè di campà quì.

 
Cume hè, Tavagna

Per sapè ne di più

L’œuvre photographique de Lola Reboud se trouve à l’interstice entre une approche documentaire et narrative. Elle est aussi nourrie de collaborations avec notamment des géographes, volcanologues et océanographes, permettant d’enrichir son propos. Dans les espaces d’expositions, son travail prend la forme d’installations in situ. 
Vous pouvez actuellement découvrir son travail au centre culturel Una Volta à Bastia
Et toute l'année sur son site.

 
Samedi 1 Juillet 2023
Vannina Bernard-Leoni


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