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Ungaretti in Corsica (5)



Giuseppe Ungaretti face parte di i pueti taliani maiò di u XX° seculu. A u principu di l'anni 1930, scrisse pè parechji ghjurnali, è fù pè un cutidianu di Torinu ch'ellu ghjunse in Corsica in u 1932. Trà ghjennaghju è marzu, Ungaretti scopre, sunnieghja è conta l'isula. E so pagine, prima pubblicate è tradutte in francese da Philippe Jacottet sò state tradutte di novu quì pè currisponde megliu, ci pare, à u territoriu. Robba sparterà ogni mese un pezzu di "Montagne, marine e gente di Corsica". Ghjuntu in Corti, ci permette di guardà sta cità incù l'ochji novi di u pueta.



A Corte, Paoli est encore présent; à vrai dire, c’est même surtout ici, dans la capitale de son royaume, au cœur des montagnes, qu’il est présent. Je le vois feuilleter ses exemplaires de Swift, de Locke, de Pétrarque, de Pope, des Evangiles ou de Rousseau. Je le vois fonder l’université, que les Français aboliront, où les moines professeurs enseignent les plus audacieuses curiosités de l’esprit tout en craignant Dieu. Je l’entends dicter là-haut, dans son Palais National, dans son bureau aux volets capitonnés de liège pour parer à quelque coup de feu perfide : « Les discordes et les divisions qui ont déjà mis à mal la tranquillité publique et privée de notre Patrie, en réveillant les inimitiés anciennes et personnelles entre ceux qui ne craignent pas Dieu et n'accordent ni soin ni intérêt au bien public, ont contraint nos principaux chefs à se réunir dans cette consulte générale, pour délibérer sur les moyens qui seraient les plus efficaces pour établir une union commune, et pour châtier avec toute la rigueur que les lois nous permettent ceux qui oseraient la mettre en difficulté par leurs querelles privées ou leurs irrégularités. Il nous est apparu que la méthode la plus sûre pour atteindre l'objectif que nous désirons était l’élection d’un chef militaire, économique et politique, doté d’un esprit éclairé, qui puisse commander ce royaume avec les pleins pouvoirs »[1].
A qui faisait pression sur lui pour la libération d’un traître il répondait : « Monsieur, quand j’aurai mis la dernière main à la parfaite liberté de ma Patrie et que je l’aurai installée sur le socle où je crois le plus opportun de la maintenir, je réunirai les Etats de l’île et leur présenterai l’homme dont vous me parlez. Je veux lui faire voir cette liberté, cette forme de gouvernement et cette félicité qu’il a cherché à détruire, après quoi je le bannirai de l’île à perpétuité »[2].
 
[1]Boswell, Relazione della Corsica, p. CXXXVIII-CXXXIX (Account, Boulton and McLoughlin, p. 87).
[2]bid. p. CLXXV-CLXXVI (Account, Boulton and McLoughlin, p. 103)

Pardon et vendetta

A propos d’un autre traître, Boswell raconte : « Paoli le fit comparaître devant lui et lui dit : “ La Corse se fait une loi de pardonner à ses fils les plus indignes quand ils se rendent, même par force, comme c’est votre cas. Pour cette fois, vous vous en tirez. Mais prenez garde. Je vous aurai à l’oeil, et si jamais vous retourniez à vos trahisons, vous savez quelle sera ma vengeance.”  Il déclara cela, poursuit Boswell, avec une fierté de lion, et on pouvait lire dans la noirceur de son œil combien ses idées de vengeance étaient terribles. Mais à peine en eut-il fini avec cet homme qu’il reprit son apparence ordinaire et s’écria :  "Allons-y !" Nous passâmes à table, et le dîner se déroula avec une  gaîté qui ne laissait rien transparaître de ce qui avait précédé »[1] .
Puis j'oublie l’Histoire. Je me perds dans un entrelacs de ruelles, je grimpe tout en haut du belvédère et me penche par-dessus le parapet. Un immense gouffre se déploie et tout en bas, on voit le Tavignanu enlaçant un rocher, et des ponts, des montagnes, des maisons, puis la Restonica qui sort de son trou comme un lapin. Dans le ciel qui s’assombrit, il me semble apercevoir un mouflon, qui sautille de rocher en rocher, et se perche, indomptable, sur la plus haute cime. Et de là-haut, s’élance hardiment et disparaît dans la musique des eaux sombres.
 
[1] Boswell, Giornale del viaggio fatto nell'isola di Corsica, dans Relazione della Corsica, vol. II, p. XLVI-XLVII (Account, Boulton and McLoughlin, p. 179-180)

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Lundi 23 Août 2021
Vannina Bernard-Leoni


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